Si les immunothérapies ont permis des progrès spectaculaires dans le traitement de certains cancers, elles ne fonctionnent que pour 10 à 40% des patients et induisent des effets secondaires ainsi que de nombreuses résistances. Pour pallier cette difficulté, la technologie i-Ther développée au CEA, portée dorénavant par Blue Bees Therapeutics, propose une nouvelle stratégie immunothérapeutique qui permettra de soigner les patients pour lesquels les immunothérapies existantes fonctionnent mal. Accompagné par la SATT Paris-Saclay depuis 2021 dans le cadre d’un programme de pré-maturation, puis de maturation, i-Ther fait aujourd’hui l’objet d’un transfert de technologie à Blue Bees Therapeutics, issue du projet. Avec un premier candidat médicament en cours de validation avant le lancement des étapes pré-cliniques réglementaires nécessaires aux premiers essais chez l’homme et une plateforme technologique en cours de développement, le projet i-Ther est particulièrement ambitieux. Le chercheur Michel Léonetti, à l’origine du projet, revient pour nous sur cette aventure.
Quelles grandes étapes ont jalonné le parcours du projet i-Ther ?
Michel Léonetti : À l’origine du projet, ce sont vingt années de recherche en immunologie menées au sein du CEA qui ont notamment permis l’élaboration d’une technologie novatrice permettant d’augmenter l’activation des cellules du système immunitaire et donc d’améliorer la capacité de celui-ci à se défendre contre le cancer. Au regard du potentiel de valorisation de cette innovation, un brevet, dont je suis co-inventeur, a été déposé par le CEA en 2020. Mais pour mener une technologie brevetée jusqu’à l’application, de très nombreuses étapes doivent être franchies dont la première est son financement. C’est dans cette optique que j’ai contacté la SATT Paris-Saclay. Après un premier programme Poc’Up de pré-maturation suivi d’octobre 2021 à octobre 2022, nous venons de démarrer un programme de maturation visant la caractérisation de notre premier produit, nommé BB-100 et la réalisation des étapes pré-cliniques réglementaires préalables aux premiers essais chez l’homme. En parallèle, je me suis mis en recherche d’un entrepreneur pour développer le projet dans un contexte de start-up. C’est dans ce cadre que Philippe Berthon, aujourd’hui CEO, a rejoint l’aventure. Ensemble, nous avons créé Blue Bees Therapeutics en mars 2022. Nous signons aujourd’hui, avec la SATT Paris-Saclay et le CEA, le transfert de la technologie i-Ther à la start-up en vue de sa valorisation.
Quel regard portez-vous sur votre collaboration avec la SATT Paris-Saclay ?
M.L. : Si j’ai, initialement, contacté la SATT Paris-Saclay pour un soutien financier, j’ai très vite réalisé que la SATT était beaucoup plus qu’un guichet de financement. Son accompagnement est réellement différent et se démarque par de très fortes interactions avec son équipe d’experts, et ce, dès le montage du dossier. Ces échanges, particulièrement constructifs, se poursuivent lors de la présentation du projet devant le comité d’investissement de la SATT et permettent un débat précieux avec un jury fortement expérimenté, puis tout au long des programmes de pré-maturation et de maturation grâce à l’accompagnement par un chef de projet dédié et chargé de nous challenger en continu. Toutes ces interactions sont essentielles. Elles ont pour objectif de pousser la réflexion sur notre projet afin d’en gommer les points faibles et d’en renforcer les points forts. Notre collaboration avec la SATT est ainsi déterminante. Elle nous apporte la vision de professionnels nécessaire à l’optimisation de notre projet.
Quelles sont vos ambitions pour l’avenir ?
L. : Notre priorité est d’emmener notre premier candidat médicament en phase clinique chez le patient à horizon 2026 – 2027. C’est la mission aujourd’hui confiée à Blue Bees Therapeutics. Dans cette optique, nous devons d’une part poursuivre la caractérisation de notre produit, de son efficacité et de sa non-toxicité notamment, dans le cadre du programme de maturation que nous menons avec la SATT Paris-Saclay, et d’autre part, s’assurer de son financement. Après une première levée de fonds de 218 K€ réalisée en août 2022 et une deuxième en cours auprès de Bpifrance, nous prévoyons de lancer une series A en 2023, que nous évaluons aujourd’hui à 10 M€. En parallèle, nous ambitionnons de poursuivre le développement de notre plateforme technologique en vue d’élaborer un véritable portefeuille de produits thérapeutiques mais aussi d’optimiser des produits existants. Cet objectif nous a mené au prestigieux concours d’innovation I-Lab dont nous sommes lauréat en 2022. Il fera également l’objet, nous l’espérons, de futurs partenariats pharmaceutiques et industriels en vue de conduire le développement clinique de ces nouvelles immunothérapies pour une meilleure prise en charge des patients atteints de cancers.
Michel Léonetti
Chercheur en immunologie
Laboratoire d’Étude et de Recherches en Immunoanalyse (LERI)
Service de Pharmacologie et d’Immunoanalyse (SPI)
Département Médicaments et Technologies pour la Santé (DMTS)
Institut des sciences du vivant Frédéric Joliot – CEA