Prévenir les problèmes d’élevage, permettre des gains de productivité importants des exploitations laitières et libérer les éleveurs de tâches difficiles et chronophages, telles sont les ambitions de la start-up AIHERD, cofondée en 2020 à Nantes par deux vétérinaires, Quentin Garnier et Léonard Théron, rejoints ensuite par Tristan Gauvain. L’ambition : accompagner la transition numérique du monde agricole en concevant la dernière génération d’outils de monitoring et de surveillance automatisée des troupeaux de bovins. Dans cette optique, l’équipe a développé, en partenariat avec le CEA LIST, une technologie unique permettant de détecter, via la vision par ordinateur et l’intelligence artificielle, tous types de pathologies et d’événements zootechniques (vêlages, chaleurs) et ce, sans capteurs invasifs pour l’animal. Accompagnée par la SATT Paris-Saclay depuis 2020 dans le cadre d’un programme de maturation, la start-up passe aujourd’hui un cap décisif avec la finalisation d’une levée de fonds de 2,1 millions d’euros qui lui permettra de déployer sa solution auprès des fermes laitières sur l’ensemble du territoire France et Benelux. Le préalable à une expansion internationale sur un marché estimé à près de 280 millions de bovins.

Comment a débuté l’aventure AIHERD ?

« Tout est parti de notre expertise métier de vétérinaires. Aujourd’hui, le processus d’élevage s’automatise toujours plus, à la fois pour permettre aux éleveurs de gagner en conditions de vie bien sûr, mais également pour répondre aux différentes problématiques liées à l’élevage, notamment aux questions de performance et de bien-être animal. Dans ce contexte, la détection, l’analyse et le suivi automatisé des pathologies et autres événements indésirables d’élevage sont de forts leviers pour optimiser la gestion des exploitations, augmenter les gains économiques en diminuant les pertes et dépenses liées aux pathologies tout en permettant des bénéfices éthiques et environnementaux. Or il n’existait pas, sur le marché, d’outils permettant un monitoring de troupeau optimal. En parallèle, nous avons vu l’émergence des technologies de vision par ordinateur et d’intelligence artificielle qui nous semblaient pleines de promesses. Nous avions besoin, pour répondre aux enjeux complexes de l’observation du vivant, d’outils extrêmement ambitieux. Nous nous sommes donc mis en quête d’un laboratoire de recherche développant ces technologies et avons débuté notre collaboration avec le CEA LIST de Paris-Saclay qui a développé avec l’entreprise Thales, après une quinzaine d’années de recherche, une technologie novatrice pour des applications de vidéo-sécurité et de vidéo-surveillance. »

Parlez-nous des grandes étapes de votre projet et de votre collaboration avec la SATT Paris-Saclay ?

« Ensemble, nous avons contacté la SATT Paris-Saclay pour financer notre projet et bénéficier de son expérience et de son expertise en transfert de technologie. Nous avons suivi les grandes étapes du programme de maturation accompagné par la SATT qui a investi dans le développement des premières briques technologiques, cœur de notre solution, à hauteur de 262 K€. Ce financement, primordial car intervenant à un stade très précoce, nous a permis de bénéficier très rapidement d’un outil performant et de réaliser très tôt des développements que nous n’aurions pu financer sans la SATT. Nous avons donc en parallèle œuvré au développement technologique de notre innovation, notamment dans le cadre d’un laboratoire commun au CEA et à AIHERD, basé sur le plateau de Paris-Saclay et dédié à la vision par ordinateur, et travaillé au développement commercial et à la distribution de notre solution, via son déploiement sur une vingtaine de fermes pilotes. Véritable démonstrateur de notre technologie, ces fermes nous ont permis de tester nos outils de distribution et de mise en exploitation, de faire la démonstration commerciale de l’intérêt des éleveurs pour notre technologie et d’obtenir des données pour entraîner nos algorithmes. Aujourd’hui, nous sommes en mesure de proposer aux éleveurs le jumeau numérique de leurs exploitations et la première solution de monitoring de vaches laitières permettant la collecte de la position de chaque animal présent sur l’exploitation, la détection de tous les comportements exprimés par ces animaux et le suivi de paramètres morphologiques d’intérêt en continu et uniquement grâce à de la vidéo-surveillance. »

Vous venez de finaliser une importante levée de fonds. Quels sont vos projets pour le futur ?

« Aujourd’hui, après avoir levé l’ensemble des verrous technologiques, nous avons la maturité suffisante pour débuter un déploiement commercial à grande échelle. C’est ce que va nous permettre cette levée de fonds de 2,1 millions d’euros, réalisée auprès de nos investisseurs historiques, mais également de VetAngels, un groupement de vétérinaires, et de Bpifrance. Notre ambition : déployer en premier lieu notre technologie en France et au Benelux, un marché comptant tout de même 60 000 exploitations et 4 millions de bovins, avant de nous tourner vers le marché international qui lui représente près de 280 millions de bovins. Notre objectif : viser 20% du marché mondial. Nous recevons, dans ce cadre, de nombreuses marques d’intérêt de la part de l’ensemble du monde de l’élevage mais aussi du monde de l’innovation puisque nous avons reçu le prix maturation Start West 2021 et avons été lauréat de la bourse French Tech Émergence et du concours i-Lab 2021 de Bpifrance et des concours innov’space et innel d’or 2022 récompensant les meilleures innovations dans le domaine de l’élevage. Et surtout, nous développons actuellement plusieurs partenariats avec des distributeurs et allons recruter une vingtaine de collaborateurs en vue d’étoffer notre équipe commerciale. Nous sommes confiants pour l’avenir. »

Quentin Garnier

CEO AIHERD