Quand la beauté de la technologie et la force du message ouvrent la voie à une série d’articles d’analyse des exposants du Showroom technologique mutualisé du Playground Paris-Saclay. Des technologies au fil de l’histoire présente les innovations du Showroom dans une vision historique. Le retour aux grands noms, les notions clés et les étapes du développement scientifique y serviront à contextualiser ces innovations récentes, à les réinscrire dans un continuum d’idées révélant encore plus leur beauté et leur complexité. Cette approche saura souligner le lien entre la profondeur des sciences fondamentales nécessitant souvent des décennies de recherche académique et le pouvoir des sciences appliquées de répondre aux défis contemporains via une alliance avec le monde industriel.
Le point de vue historique de Natalia
La révolution néolithique, la Révolution française, la quatrième révolution industrielle, il paraît que l’humanité adore avancer par à-coup ! Mais si la grande transformation des chasseurs-cueilleurs en agriculteurs nous est connue depuis la sixième, personne ne raconte le changement qui, aujourd’hui, a bien plus d’impact sur nos sociétés et qui s’opère ici et maintenant. Personne ? Si, Henning Kagermann, physicien et homme d’affaires allemand, qui a conceptualisé la notion de l’industrie 4.O en 2011. Depuis, elle n’arrête de conquérir les marchés et redéfinir les façons de concevoir les processus de production. Mais qu’est-ce qui se cache derrière ce terme retentissant ?
La quatrième révolution industrielle ou l’industrie du futur, selon la définition qu’en donne IBM, est synonyme de fabrication intelligente (en anglais : smart manufacturing). L’industrie 4.0 est l’expression de la transformation numérique du domaine, elle permet de gagner en productivité et flexibilité grâce à un ensemble de nouvelles technologies incluant L’IA, IdO (Internet des objets), la conception numérique ou encore l’apprentissage automatique. Une définition qui risque de nous perdre par la quintessence des termes que l’on entend souvent sans forcément connaître ou comprendre les réalités se cachant derrière. Heureusement, l’une des start-up de la première vague du Showroom technologique de Paris-Saclay nous offre un exemple concret : EikoSim qui propose des jumeaux numériques adaptés aux besoins de grands industriels . Sa technologie illustre parfaitement l’idée de l’industrie 4.0 et permet d’en comprendre les tenants et aboutissants. Mais avant de nous plonger dans les détails, remontons rapidement le fil du temps pour voir quelles évolutions technologiques et sociétales ont préparé son terrain.
Les trois premières révolutions
Faisons les choses dans l’ordre : avant la quatrième, il y a eu trois révolutions industrielles qui l’ont précédée. La première bouleverse la science avec les travaux de Sadi Carnot, le père de la thermodynamique (même si le mot « thermodynamique » apparait plus tard). Cette époque fait naître la machine à vapeur, la mécanisation progressive du travail et la création des usines. Pour faire marcher ces dernières, la population rurale est emmenée vers les villes. Même s’il est difficile à imaginer le monde aux temporalités différentes des nôtres, ce n’est qu’à cette époque que le concept des heures de bureau voit le jour. Avant les vies était rythmées par les saisons et le soleil, maintenant c’est la sonnette et la cheminée. S’en suit une refonte des sociétés, la naissance de la classe ouvrière avec toute la pensée politique qui l’entoure et surtout…
…La deuxième révolution industrielle
Car nous n’arrêtons pas le progrès, selon un dicton populaire. Cette fois-ci, l’élément de rupture, c’est la maîtrise de l’électricité. En 1871, juste après la guerre franco-prussienne et la Commune de Paris, le belge Zénobe Gramme présente la machine dynamo-électrique à l’Académie des Sciences de Paris, évènement suivi de dépôt de brevet. Cette invention ouvre la voie à la production à la chaîne, les voitures Ford et le fordisme en tête de gondole. Prélude de la société de consommation et bouleversement de modes de vie : le nouveau transport change notre perception du temps et des vitesses, redéfinie les distances et les territoires.
La troisième révolution industrielle naît à son tour des transformations technologiques et sociétales engendrées par les deux premières. Technologiquement parlant, elle repose sur les progrès en informatique. Aujourd’hui elle allie la quête des énergies renouvelables, née de la finitude de ressources, aux technologies de la communication. Le popularisateur du concept, Jeremy Rifkin, essayiste et économiste américain prône les circuits énergétiques en réseau, à l’échelle à la fois individuelle (via les ménages producteurs d’énergie) et continentale (gestionnaires et redistributeurs de flux). Smart grid, véhicules hybrides, stockage d’énergies renouvelables, bâtiments énergétiquement autonomes font partis des éléments clé autour desquels s’articule la troisième révolution industrielle.
Mais si le tournant par rapport aux énergies fossiles et nos façons de penser leur distribution est spectaculaire, nous demeurons encore dans un univers d’objets réels et physiques, tandis que la quatrième révolution nous inscrit désormais dans le métaverse, le tout numérique. Le « tout » n’est même pas une exagération, car l’Internet des Objet multiplie les jumeaux, les device shadows, en clonant outils, personnes et villes entières. Ainsi l’agglomération Paris-Saclay se dote d’un jumeau numérique, développé par l’Institut de Recherche technologique SystemX et l’entreprise Cosmo Tech, qui l’assistera dans la transition énergétique. Ce qui est difficilement possible ou problématique dans le monde réel, peut être résolu dans l’univers numérique. Les jumeaux numériques permettent de tester les solutions et estimer leur portée réelle avant l’application effective.
La start-up Eikosim, issue du laboratoire de Mécanique et de Technologie (LMT) de l’ENS Paris-Saclay, et ses deux fondateurs, Florent Mathieu et Renaud Gras, maîtrisent le sujet à la perfection. La start-up crée des jumeaux numériques dont raffolent les grandes entreprises industrielles. Quelle en est la raison ? Elémentaire : l’intérêt d’avoir les digital twins pour les grands groupes est le même que pour les agglomérations. Il réside dans le pouvoir de se procurer un modèle évolutif, de tester des hypothèses à moindre coût économique, car en tirant des conclusions des simulations, les erreurs peuvent être évitées dans la vie réelle.
Comment cela marche ? De manière générale, le jumeau numérique est une réplique de produits, structures, circuits… il intègre les données changeantes dans le modèle, permettant ainsi à ses exploitants de faciliter leur contrôle et maintenance. Un autre atout de cette technologie réside dans l’optimisation des performances qui découle des pouvoirs pronostiques élargis qu’elle procure. Dans le cas de l’EikoSim, la start-up se spécialise dans les structures et élabore des logiciels de simulation, d’utilisation et d’analyse d’imagerie, le tout pour optimiser les essais mécaniques.
Cette quatrième révolution est fulgurante, ses avancées technologiques vont plus vite que l’évolution du cadre juridique et sa mise en place. Désormais les device shadows couvrent plusieurs domaines et sont exploités par des acteurs très variés, allant de l’EDF dupliquant un réacteur nucléaire en cyberspace aux …architectes qui exploitent le jumeau numérique de Notre-Dame de Paris à des fins de conservation.
Les applications de cette technologie de l’industrie 4.0 sont multiples, venez en révéler la portée dans le Showroom technologique de Paris-Saclay ! Lors de la visite nous aborderons plus en profondeur le processus de création des jumeaux numériques et son état d’art sur le territoire d’excellence scientifique et industrielle Paris-Saclay.