Quand la beauté de la technologie et la force du message ouvrent la voie à une série d’articles d’analyse des exposants du Showroom technologique mutualisé du Playground Paris-Saclay. Des technologies au fil de l’histoire présente les innovations du Showroom dans une vision historique. Le retour aux grands noms, les notions clés et les étapes du développement scientifique y serviront à contextualiser ces innovations récentes, à les réinscrire dans un continuum d’idées révélant encore plus leur beauté et leur complexité. Cette approche saura souligner le lien entre la profondeur des sciences fondamentales nécessitant souvent des décennies de recherche académique et le pouvoir des sciences appliquées de répondre aux défis contemporains via une alliance avec le monde industriel.
Planter les tomates sur le rebord de la fenêtre de son appartement parisien est certainement une mode et un geste écologique aujourd’hui, tout comme mettre en valeur les orangeries dans ses palais européen était un geste symbolique pour démontrer la richesse et le pouvoir à la Renaissance. Notre approche à la végétation et surtout à l’agriculture, fondement et cause historique du développement de notre civilisation, reflète bien l’image de nos sociétés à l’instant historique. Mais au-delà du reflet, pouvons-nous y trouver une vision d’avenir, une promesse de dépassement des défis actuels, une visée.
Le point de vue historique de Natalia
Farm3 et l’agriculture alternative
Depuis les années 1950, le monde occidental vit une ère qu’aucune des sociétés précédentes n’a jamais connue : l’ère sans famine ni disette, l’ère où nous jetons à la poubelle 41.2 tonnes de nourriture chaque seconde. Pourtant l’époque où la France dînait par cœur n’est pas si éloignée, elle a pris fin en 1949 quand étaient abandonnés les derniers tickets de rationnement. Un progrès fulgurant, un revirement de situation incroyable : le faste impérial est à la portée de tout le monde, ou presque. La démocratisation de l’accès aux biens de consommation est omniprésente, mais le lien que nous avions jadis avec la nature est rompu. Nous mangeons à notre faim certes, mais le contenu abondant de nos assiettes n’améliore pas toujours notre santé à la longue. De plus, les citadins éprouvent le manque d’espaces verts et d’air pur, et pour couronner le tout, vient l’éco-anxiété voire la solastalgie : le terme bien caractéristique des dernières décennies qui traduit le sentiment de perte de contrôle sur son environnement et l’angoisse qui en découle*. C’est lourd, c’est beaucoup, ça demande le changement de modèle qui, de fait est déjà là.
*Le terme d’éco-anxiété a été formalisé par Véronique Lapaige, médecin-chercheur en santé publique et en santé mentale, en 1996. Pour elle, l’éco-anxiété ne traduit pas uniquement un sentiment négatif, mais amène une responsabilisation vis-à-vis de la situation.
Les grands défis, un instant de détresse, et l’agriculture alternative, une voie de secours
Le réchauffement climatique ou plus exactement la modification des régimes météorologiques à l’échelle planétaire, l’augmentation de la population vertigineuse, la finitude des ressources – les grands défis auxquels l’humanité fait face ne sont plus à présenter. L’intrication des trois fait anticiper des scénarios apocalyptiques dans les meilleures traditions du cinéma américain. Devant l’immensité de la chose il est facile de se sentir dépassé, d’où la recrudescence de problèmes psychologiques liés à l’éco-anxiété, mais aussi le déni de changement climatique qui aboutit au maintien d’ordre établi et d’habitudes de consommation même si le monde occidental ne peut plus se les permettre. Or, au-delà de l’appel à réduire la consommation et assurer la transition énergétique et écologique qui sont les réponses globales, il existe une palette riche d’initiatives qui, en partie, peuvent se regrouper sous casquette de l’agriculture alternative.
Selon le dictionnaire d’agroécologie, l’agriculture alternative se définit comme des systèmes de production utilisant des méthodes non conventionnelles durables optimisant l’utilisation des ressources. L’une des facettes technologiques caractérisant l’agriculture alternative est le soin de protéger l’environnement et plus précisément le sol et l’eau. Une autre facette qui la distingue inclut une dimension sociale visant à améliorer les conditions de vie des agriculteurs et des consommateurs, souvent via la création d’un réseau de distribution locale et la vente de produits de qualité. La permaculture, l’agroforesterie, l’agriculture biologique s’inscrivent toutes dans cette nouvelle tendance.
L’agriculture alternative de Paris-Saclay
A cheval entre l’innovation et la conservation de terres agricoles et céréalières, le territoire Paris-Saclay en connait bien des exemples. Ainsi la Ferme des potagers de Marcoussis incarne le volet social de l’agroécologie. Cette association essonnienne se spécialisant en maraichage biologique, transformation et commercialisation de produits locaux et bio, offre des contrats de travail favorisant l’insertion professionnelle des personnes en difficulté. En outre, les compétences de son équipe permettent de faire perdurer cette tradition saclaysienne qu’est la diversification de cultures tout en y apportant une ambition écologique contemporaine*.
*Pierre VELTZ, Saclay. Genèse et défis d’un grand projet, p.22
Quant au volet technologique de l’agriculture alternative, il s’incarne à travers de nombreuses initiatives, dont le tissu ne va que se densifier avec l’arrivée sur le plateau du campus Agro Paris-Saclay d’AgroParisTech et d’INRAE qui ouvrira ses portes en septembre 2022. Mais les bases sont déjà posées depuis un moment, avec, entre autres, l’une des tendances très en vogue, l’hydroponie. Elle cristallise l’idée du soin qui est porté par les chercheurs et entrepreneurs à économiser les ressources précieuses, et notamment, l’eau. Appelée également culture hydroponique ou agriculture hors-sol, elle permet de faire pousser les plantes sans contact direct avec le sol comme son nom l’indique. Historiquement, cette technique de culture nouvelle génération apparaît assez tôt sur des continents différents. Depuis des siècles, les cultivateurs chinois savaient faire des potagers sur du gravier, substrat neutre, dont l’utilisation correspond à la définition moderne des techniques hors-sol. En Amérique latine, les Aztèques créaient des jardins flottants et en Afrique, les Egyptiens profitaient des eaux du Nil à des fins de cette agriculture précoce. Or, la première personne qui utilise le terme et conceptualise l’hydroponie en 1929 comme une technique de culture dans laquelle les plantes baignent leurs racines dans une solution nutritive, était William Frederick Gericke, chercheur à l’université de Californie, Beckley.
Farm3 et ultrabioponie dans le Showroom du Playground Paris-Saclay
Très avancée aujourd’hui, l’hydroponie ouvre le bal à des start-up innovantes, proposant des solutions originales qui répondent à des problématiques contemporaines variées. Ainsi Farm3, une start-up exposante du Showroom technologique mutualisé de Paris-Saclay, s’est initialement engagée à apporter aux citadins des légumes et herbes frais, produits localement et aux qualités nutritives exceptionnelles. Sa technologie constitue de fait un pas en avant par rapport à l’hydroponie. Avec le temps, le projet devient encore plus ambitieux et Romain Schmitt, CEO et fondateur de la start-up Farm3, développe une nouvelle ligne de produits, cette fois-ci dans le domaine de sylviculture, culture des arbres, cruciale pour la planète. Selon Thierry Caquet, directeur scientifique à l’INRAE, « l’adaptation de l’agriculture et de la forêt aux aléas climatiques et au climat futur implique de dépasser les démarches incrémentales et d’accélérer la reconception des systèmes de production. Tous les leviers n’ayant que des effets partiels, c’est leur combinaison qui permettra l’adaptation et la durabilité des activités ». La démarche de Farm3 s’inscrit bien dans cette lignée. Nous racontons plus en détails son inscription dans la palette de mesures existantes lors des visites guidées de notre Showroom technologique. Venez vite réserver la vôtre pour découvrir la puissance de nouvelles technologies s’engageant pour la protection de l’environnement et l’adaptation au changement climatique !